Quand le maire n’aime pas le conseiller général du canton…

CHRONIQUE SUR LES ATTEINTES À LA DÉMOCRATIE LOCALE

DÉCODAGE

CONTEXTE. La pratique républicaine veut que les maires, périodiquement, mettent gratuitement à la disposition des conseillers généraux, des députés… un bureau afin qu’ils puissent y tenir une permanence. Dans la majorité des communes, les choses se passent le plus normalement du monde. Mais dans certains cas, certains maires, forts de leurs pouvoirs, s’arrogent le droit d’empêcher la tenue de ces permanences à certains élus qu’ils considèrent comme des opposants politiques. Il s’agit d’une discrimination qui contrevient au principe d’égalité républicaine.

ENJEUX. Nous ne sommes pas dans les faits divers amusants, mais dans la pratique concrète de la démocratie locale. C’est un sujet sérieux. Il est intolérable que de telles pratiques existent. Il est intolérable que la République ne les empêchent pas. Il est intolérable que le Code général des collectivités territoriales ne sanctionne pas de tels agissements.

Bernard MÉRIGOT

DRAMATIS PERNONAE (1)

  • Nicolas SCHOETTL, conseiller général du canton de Limours (Divers droite). (2)
  • Bernard VÉRA, maire de Briis-sous-Forges (Parti communiste) (3).

La scène se passe le samedi 7 juillet 2012, à Briis-sous-Forges (Département de l’Essonne)


DOCUMENT

« Briis-sous-Forges : une permanence bien étrange

Chaque samedi, j’effectue une permanence dans une des communes du canton, cela me permet de recevoir les habitants au sein de leur mairie, grâce à un bureau mis à ma disposition.

UNE INSULTE À LA DÉMOCRATIE

Samedi dernier, ma permanence avait lieu à Briis-sous-Forges et si je tenais à vous en faire un post, c’est que les méthodes mesquines et médiocres constituent une insulte à la démocratie et atteignent un niveau tel qu’il m’est impossible de ne pas vous en parler.

Depuis mon élection en 2009, j’ai tenu plus d’une centaine de permanences à travers notre canton, c’est un moment de proximité où les habitants peuvent s’exprimer librement en toute confidentialité, évoquer des problèmes de logements sociaux, leurs difficultés ou le casse tête des subventions pour les responsables associatifs, ce contact humain, direct, les yeux dans les yeux est un moment que j’apprécie particulièrement.

Pour informer au mieux les habitants de ma présence dans chaque commune, j’envoie un document à chaque mairie qui indique le programme de mes permanences pour le trimestre à venir pour leur panneau d’information communale, à ce jour, seule, la commune de Briis-sous-Forges n’a pas souhaité que les Brissois soient informés de ces permanences et affiché les documents que je lui fournis…

MA SIBÉRIE A MOI

C’est aussi la commune où organiser une permanence est le plus compliqué, y trouver un bureau dans la mairie est systématiquement une mission impossible, curieusement, mon prédécesseur que je connais bien, finissait par obtenir un coin pour s’installer, pour ma part, on m’installe dans la MJC, ce qui, sur la forme, ne me pose aucun problème, mais qui me parait étrange ,comme si il y avait moins d’activités le week-end à la MJC qu’en mairie… à moins que cela ne soit une mesure d’éloignement, ma Sibérie à moi.

 Je suis là pour travailler et recevoir mais, en réalité, sur le fond c’est un moyen voulu de me rendre inaccessible et invisible, cette attitude est regrettable et préjudiciable pour les Brissoises et les brissois.

LA PORTE NE S’OUVRE QUE DE L’INTÉRIEUR

Si, par chance, vous étiez arrivé à me trouver ce samedi matin, vous seriez tombé devant une porte close, en effet, je ne sais pas pour quelle raison, la porte ne s’ouvre que de l’intérieur, il fallait donc frapper à la porte pour me rencontrer… à moins d’être un visiteur très volontaire, après un essai sur une porte close, on se retire.

Comme si tout cela ne suffisait pas dans la méthode peu républicaine, la simple vue du « bureau » qui m’avait été attribué par le premier magistrat, parlait de lui même : ces élus qui exigent pour eux respect, écoute, et qui se drapent dans leur écharpe, ont appris à l’école de leur formation comment traiter les autres : un beau « bureau »…    Sans chaises… j’ai voulu accéder à d’autres bureaux pour y emprunter une chaise, tous verrouillés à clés ! Ce qui illustre de la grande activité de cet établissement.

UNE SEULE ET UNIQUE CHAISE…

Après une recherche approfondie des locaux, j’ai fini par trouver une chaise…

Mitigé entre l’exaspération et le fou rire tellement cette situation était aberrante, j’ai effectué malgré tout ma permanence.

Les Brissois que j’ai reçu ce samedi matin, debout, ont été scandalisés et ce de manière unanime sur ses méthodes déplacées qui n’apportent rien, mais démontrent bien les bassesses de Monsieur Le Maire de Briis-sous-Forges et son sens de l’accueil vis-à-vis d’élus qui ne seraient pas de son parti politique. 

Peu d’élégance, peu de respect vis-à-vis de ses propres concitoyens, en fait, la démonstration que je le dérange, que je l’inquiète.

Quand je vois le comportement de ses « sbires » lors de l’élection cantonale dans le bureau de vote de Janvry, je me dis qu’il ne fait pas bon d’être Brissois si on n’est pas dans la ligne.

Ce n’est pas ma conception de la vie publique et à écouter les Brissois de bien des sensibilités politiques différentes, ce n’est pas leur aspiration non plus.

CHAISE, FAUTEUIL ET TRÔNE

Ces pratiques datent, à Briis-sous-Forges, certains pensent qu’elles ne dureront plus aussi longtemps qu’elles n’ont duré, car, à bien y regarder, si on se tient ainsi, vis-à-vis d’un Conseiller Général, on imagine comment sont traités certains habitants, et l’on comprend mieux, pourquoi ce sont des mois pour obtenir de la mairie une réponse ou un rendez-vous.

A force de priver de chaises, certains pourraient bien perdre leur fauteuil… qu’ils prennent pour un trône. »

Nicolas SCHOETTL (4)

RÉFÉRENCES
1.
Dramatis personae : expression latine désignant la liste des personnages d’une pièce de théâtre.
2. Nicolas SCHOETTL
(Divers droite) est conseiller général de l’Essonne depuis 2009 dans le canton de Limours (qui comprend douze communes : Boullay-les-Troux, Briis-sous-Forges, Courson-Monteloup, Fontenay-les-Briis, Forges-les-Bains, Gometz-la-Ville, Gometz-le-Châtel, Janvry, Les Molières, Limours, Pecqueuse, Vaugrineuse).
3. Bernard VÉRA (
Parti communiste) est maire de Briis-sous-Forges (3 226 habitants) depuis 2001, réélu en 2008. Il a été sénateur de l’Essonne de 2004 à 2011.
4. SCHOETTL Nicolas,
« Briis-sous-Forges : une permanence bien étrange », www.schoettl.over-blog.com, 7 juillet 2012.

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