Le « n’importequisme » en politique (Charles Benoist)

CANTONALES 2011 : LE CAS JUVISY-SUR-ORGE / SAVIGNY-SUR-ORGE

Au lendemain du premier tour d’une élection, c’est fou le nombre d’élus qui adressent des consignes de vote pour le second tour ! A croire que les électeurs sont des incapables et qu’ils sont dans l’impossibilité de se forger une opinion et de choisir un bulletin de vote.

C’est le cas de madame le maire de Savigny-sur-Orge qui, bien que n’étant pas candidate, prend un grand soin pour «guider» les électeurs. Elle publie, coup sur coup, deux communiqués successifs :
– un premier, le 21 mars 2011, pour dire pour qui il fallait voter (1),
– un second, le 23 mars 2011 pour expliquer que ce qu’elle a dit ne voulait pas dire ce que les électeurs ont compris qu’elle disait (2), après la publication d’un article du Parisien  dont le titre est : « La maire UMP accusée de tendre la main au FN » (3)
Vous me suivez ? On apprend ainsi pêle-mêle de troublantes évidences, que « le vote est un devoir républicain », et qu’il « ne faut pas se tromper de vote »… Intéressant, non ?

« LE N’IMPORTEQUISME »

Je livre à votre réflexion ces lignes de Charles BENOIST (4). Il décrit « le n’importequisme » qui est une des maladies de la démocratie. «En même temps qu’une indifférence qui va au dégoût par la lassitude, cet état morbide procède, sous certains de ses aspects ou dans quelques-unes de ses manifestations, d’un autre mal généralement connu et appelé tour à tour « l’envie démocratique », « l’ingratitude populaire », « la haine ou la défiance des supériorités », « le culte de l’incompétence » aboutissant, pour finir, à « la république des camarades » (p. 82).

On comprend l’embarras de ceux qui veulent donner des consignes de vote aux électeurs. Il se trouve que Charles BENOIST, qui a dénoncé « l’art de capter le suffrage et le pouvoir», écrit : « A la racine du mal, nous retrouvons toujours l’électorat. L’élection devrait être un choix. Elle n’en est pas un. Mais, sans s’approprier, pour juger une liste de candidats, le langage sévère de l’anglais, John Stuart MILL parlant de « la demi-douzaine d’oranges gâtées qui composent peut-être tout l’assortiment du marché local », il faut avouer que le choix est parfois difficile. Si toutes les oranges ne sont pas gâtées, beaucoup ne sont pas mures ; et ce ne sont pas les meilleures qui sont le plus demandées» (p. 86).

LA CONDITION DÉCEPTIVE DE LA DÉMOCRATIE

Charles BENOIST concluait « Ceux-là ou d’autres, n’importe quoi, n’importe quand, n’importe où, n’importe comment. Ainsi se contracte, s’étend et se propage le n’importequisme». Il s’agit de ce que Myriam REVAULT D’ALLONNES nomme aujourd’hui la condition déceptive de la démocratie « l’expérience démocratique fait de nous des sujets qui ne veulent pas être ainsi gouvernés : « pas comme ça, pas pour ça, par par eux » (7).

« Pas comme ça, pas pour ça, pas par eux». Beau titre pour un programme !

RÉFÉRENCES

1. SPICHER-BERNIER Laurence, «Au coeur de la 7e circonscription», www.les amisdelaurence.fr.
2. SPICHER-BERNIER Laurence, «Osons un discours franc !», www.lesamisdelaurence.fr.
3. « Savigny-sur-Orge/Juvisy-sur-Orge, « La maire UMP accusée de tendre la main au FN », Le Parisien Essonne-matin, 23 mars 2011.
4. Le Parisien Essonne-matin, 24 mars 2011.
5. BENOIST Charles, Les maladies de la démocratie, l’art de capter le suffrage et le pouvoir, Éditions Prométhée, Paris, 1929, 275 p.
6. Ibidem.
7. REVAULT D’ALLONNES Myriam, Pourquoi nous n’aimons pas la démocratie, Seuil, 2010, 148 p.

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