« La démocratie locale à reculons » doit cesser

LA LETTRE DU LUNDI DE MIEUX ABORDER L’AVENIR

Pourquoi certains pouvoirs politiques en place refusent-ils, de façon systématique, de pratiquer une démocratie locale ouverte ? La réponse est simple : ils n’ont pas compris que les temps avaient changés. Ils se cramponnent à une conception obsolète : celle de la-démocratie-locale-à-reculons. Sa définition est simple.

  • la démocratie locale véritable est une aspiration, profonde et croissante, de tous les acteurs d’un territoire donné (habitants, usagers, citoyens…),
  • la démocratie-locale-à-reculons est la réponse que certains élus, et certains exécutifs locaux (communes, intercommunalités…) apportent : répondre en traînant les pieds, différer les réponses, refuser de communiquer tout document public… ou, encore mieux, ne pas répondre du tout.
    Elle relève, et s’accomplit, dans la procrastination politique : diffuser le moins d’informations publiques, le plus tard possible, cacher les documents relatifs aux décisions publiques, les instrumentaliser pour imposer un seul choix (le sien), instaurer un « secret défense municipal » sur tout document ou toute étude locale, refuser l’accès à tout document… et attendre que le demandeur (élu minoritaire, citoyen ou association) saisisse – dans les délais et dans les formes – la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA). Autant de temps de gagné…

RELATION D’AUTORITÉ
OU RELATION D’ANIMATION ?

Les années 1990-2010, situées d’égale part entre la fin du XXIe siècle et le XXIe siècle, demeureront comme des « années-charnières ». Une vingtaine d’années qui ont connues un renversement de la nature des attentes citoyennes à l’égard de la gouvernance politique. Aujourd’hui, tous les groupes sociaux aspirent à participer aux actions publiques locale. En conséquence, l’élu local n’est plus à même d’exercer une relation d’autorité. Celle-ci est devenue, qu’ils l’acceptent ou le refusent, une relation d’animation territoriale, fondée sur l’échange, le dialogue, l’argumentation, le débat. C’est un fait.

De nombreux élus locaux ont compris que leur mission avait changée. La gouvernance qu’ils doivent désormais pratiquer n’est plus d’imposer un intérêt général supérieur, mais de contribuer à la médiation entre différents intérêts territoriaux, pris dans le sens le plus large, pour le plus grand nombre, et pour un développement durable.

LE PARTAGE DU POUVOIR

Nous sommes sortis de la logique représentative autoritaire. Pour un élu, le fait d’avoir remporté une élection n’est plus une condition suffisante pour représenter seul l’intérêt général, et de s’exprimer, à tout moment, à la place des habitants, sur tous les sujets, comme seule personne compétente. Sa nouvelle légitimité ne peut s’appuyer que sur sa capacité à les écouter, à les faire s’exprimer, à dialoguer avec eux. En un mot, à partager le pouvoir local en créant une dynamique partenariale, débouchant sur des projets commun, partagés.

LOGIQUE DE GUICHET ET LOGIQUE DE PROJET

L’élu-animateur s’inscrit dans une logique de projet. Il est opposé à la figure de l’élu gestionnaire qui s’inscrit dans une logique de guichet. Dans cette nouvelle logique, le territoire est à même de concilier qualité de vie, attirance de compétences et financements extérieurs afin d’assurer son développement. Les habitants demeurent dans une commune, de nouveaux habitants, de nouveaux commerces, de nouvelles entreprises… ne viennent s’installer dans une commune que lorsqu’elle est attractive  (équipements de qualité, bon fonctionnement des services municipaux, prise en compte des demandes, élaboration de projets…).

LES EXPERTISES LOCALES

Dans le cadre de cette nouvelle gouvernance, l’élu ne décide plus seul. Il doit nécessairement collaborer avec toutes les expertises locales (citoyens, entreprises, associations…) en associant des personnes-relais aux processus de décision. Celles-ci sont autant d’ouvertures vers de nouveaux réseaux, vers de nouvelles compétences, de nouvelles ressources… tant pour la gestion quotidienne de la vie locale que pour les projets territoriaux d’avenir.

LE NOUVEAU SOCLE DE LA DÉMOCRATIE

Il ne faut pas oublier le contexte général de désaffection et de défiance du citoyen vis-à-vis du politique. Les enquêtes des années 2000-2009 l’établissent. C’est donc en renonçant volontairement aux formes traditionnelles d’autorité que les élus peuvent retrouver une légitimité. Certains l’ont compris. D’autres s’y refusent. Aujourd’hui, le recours à la participation, à la concertation et au partenariat constituent les composantes du nouveau socle de la démocratie locale.

RÉFÉRENCES
HAU Thierry,
« L’ouverture et le repositionnement de l’élu local (II) », www.thierryhau.over-blog.com,
PASQUIER Romain, SIMOULIN Vincent, WEISBEIN Julien,
La gouvernance territoriale, L.G.D.J., Paris, 2007.
LOGIÉ Gérard,
L’intercommunalité au service du projet de territoire, La Découverte/Syros, Paris, 2001.
GORGEU Yves, JENKINS Catherine,
La charte de territoire : une démarche pour un projet de développement durable, La Documentation française, Paris, 1997.

Mieux Aborder L’Avenir (MALA), La Lettre du lundi, 24 septembre 2012

 Mention du présent article : http//www.savigny-avenir.info/ISSN 2261-1819

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