Qui sont les plus importants : les candidats ou les électeurs ?

DÉCODAGE

CONTEXTE. En politique, quatre personnages occupent la scène de la démocratie. Deux sont des acteurs et deux sont des non-acteurs. Les électeurs et les candidats sont des acteurs réels. Les non-électeurs et les non-candidats sont des acteurs virtuels. Les non-électeurs sont les abstentionnistes, ceux qui ne votent pas. Les non-candidats sont ceux qui ont annoncé qu’ils seraient candidats, et qui ne le sont pas ; ceux qui auraient pu être candidats et qui ne l’ont pas été ; ceux qui auraient voulu être candidats, et qui n’ont pas eu les moyens de l’être, ceux qui n’ont pas pensé à être candidats…
ENJEUX.
Est-ce que, lors de chaque échéance électorale, on ne prête pas une attention politique déséquilibrée ? On fait grand cas des acteurs réels (visibles) et on ne veut pas voir les non-acteurs (invisibles) ?

LES ÉLECTEURS OU LES CANDIDATS ?

Les sondages d’opinion concernant les électeurs occupent à chaque élection une place démesurée. En revanche, les mécanismes qui concernent les candidats, et qui aboutissent à leur candidature (ou à leur non-candidature), occupent une place plus modeste, parfois inexistante.

Est-ce que les voies et les discours conduisant à la non-candidature ne sont pas tout aussi déterminantes que celles du non-vote ? En effet, les résultats d’un scrutin sont différents selon le nombre de candidats, selon l’éventail des candidatures proposées, selon les investitures des partis politiques, selon la présence d’un candidat au premier tour qui « capte » des voix qui, en son absence, seraient allées à un autre candidat, selon les règles de maintien au second tour, selon les consignes de vote, selon des reports (réels ou supposés) des votes au second tour…

LA PRÉSENCE OU L’ABSENCE ?

  • Quelles sont les conséquences des investitures (ou des non-investitures) des partis politiques sur les résultats ?
  • Quels sont les effets des candidatures (et des non-candidatures) dissidentes ?
  • Quel est l’ordre qui prime, l’ordre électoral (qui concerne l’électeur) ou l’ordre canditatorial (qui concerne le candidat) ?

LES TROIS MODÈLES DE COMPORTEMENT « ÉLECTORAL »

En science politique, il existe trois modèles principaux d’explication des comportements électoraux :

1. le comportement « sociologique », fondé  sur  un effet de variables socio-économiques (sexe, âge, classe sociale, histoire familiale…),
2.
le comportement « psycho-sociologique » : l’électeur choisit son candidat à travers une identification partisane qui oriente son choix,
3.
le comportement de « l’électeur rationnel » qui effectue des choix politiques en maximisant ses intérêts.

LES MODÈLES DE COMPORTEMENT « CANDIDATORIAL »

1. Candidat sortant / candidat nouveau. Deux cas se présentent : celui du candidat sortant et celui du candidat nouveau. D’un côté la justification s’appuyant sur un bilan (ce qui a été fait) et de l’autre, la critique du bilan (ce qui a été mal fait, ce qui n’a pas été fait…). On doit se demander s’il existe des candidatures « naturelles » tant les candidats revendiquent ce caractère comme caractéristique de leur démarche.

2. Candidat indigène / candidat allogène. Pour le candidat nouveau, deux cas. Soit c’est un candidat « indigène » (qui est né dans le pays), soit c’est un candidat « allogène » (d’une origine différente de celle de la population autochtone, installé tardivement dans le pays), un parachuté, comme le qualifient couramment ses opposants. Quant au candidat sortant, il peut être un ancien parachuté qui a été élu. Le parachute est alors replié et oublié.

3. Candidat investi / candidat non investi. Pour tous les candidats, se pose la question de l’investiture d’un parti ou de plusieurs, grands partis ou petits partis, garanties de notoriété et de moyens financiers pour assurer les frais de campagne.

4. Candidat orthodoxe /candidat dissident. Le candidat orthodoxe suit le parti auquel il appartient. Le candidat dissident se présente sans l’investiture de son parti, contre un candidat orthodoxe. Le parti menace soit de l’exclure, soit l’exclut. S’il est élu, il peut le réintégrer ou être apparenté.

5. Candidature spontanée / candidature négociée. La candidature négociée est une candidature qui est déposée pour en empêcher une autre, ou pour gêner une autre, ou pour obtenir le retrait d’une autre.

Qui est le plus important, le candidat ou l’électeur ? L’offre politique ou la demande politique ? Le producteur ou le consommateur ? Telles sont les questions qui se posent chaque fois que l’on constate le décalage entre la démocratie vécue et la démocratie commentée et médiatisée, la démocratie réelle et la démocratie espérée, la démocratie des spectateurs et la démocratie des acteurs.

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