Des syndicats de communes aux communautés intercommunales

CHRONIQUE POUR BIEN INTÉGRER LA CALPE

Les premières initiatives modernes de coopération intercommunale remontent au XIXe siècle avec la création des commissions syndicales pour gérer les biens indivis entre communes (1837) et aux ententes intercommunales.
La loi du 5 avril 1884 sur l’organisation municipale (JO du 6 avril 1884), complétée par la loi de 1890, prévoit dans son article n°169, que lorsque plusieurs communes « ont fait connaître par des délibérations concordantes, leur volonté de s’associer en vue d’une oeuvre d’utilité intercommunale », et qu’elles ont décidé « de consacrer à cette oeuvre des ressources suffisantes », l’association prend le nom de syndicat de communes.  Interrogé au moment du vote de la loi sur le contenu désigné par l’expression « oeuvre d’intérêt intercommunal », le sénateur Eugène LABICHE, répond que « toute énumération aurait eu l’inconvénient d’être restrictif ».

La voie de la coopération entre communes est progressivement élargie :

  • autorisation des syndicats mixtes (1955),
  • remplacement de la règle de l’unanimité par celle de la majorité qualifiée (1959),
  • création des communautés de commune (1992),
  • création des communautés d’agglomération (1999),
  • cohérence des périmètres territoriaux (2004).

PERMETTRE LA MANIFESTATION
DES SOLIDARITÉS TERRITORIALES ENTRE COMMUNES

Le cadre juridique est défini initialement par la loi du 22 mars 1890 qui crée les syndicats de communes. Par ce texte, le législateur autorise les communes à constituer entre elles un établissement public autonome, destiné à créer et gérer un service d’intérêt commun. De nouvelles demandes demeurent sans réponse.

La naissance de la coopération intercommunale vient d’une exigence, d‘un constat et d’une nécessité.

  • L’ exigence.  Comment répondre aux besoins croissants des populations ?
  • Le constat.  Comment faire dans la mesure où les communes seules ne peuvent pas faire face à ces demandes ?
  • La nécessité.  Comment permettre la manifestation des solidarités territoriales nécessaires ?

Le partenariat entre les différentes collectivités locales est élargi par le décret du 20 mai 1955 autorisant la constitution de syndicats mixtes.

LA MAJORITÉ QUALIFIÉE REMPLACE L’UNANIMITÉ

Limité à l’origine à la satisfaction d’un objet unique, les syndicats intercommunaux voient leur champ d’intervention étendu à des objets multiples par l’ordonnance du 5 janvier 1959. Ce texte remplace la règle de l’unanimité par la règle de la majorité qualifiée, facilitant ainsi les créations d’établissements publics de coopération intercommunale. Évolution importante qui met fin aux bloquages causés par les individualismes et qui reconnaît une légitimé du groupe.

Dans la deuxième moitié du XXe siècle, le développement du fait urbain conduit le législateur à créer de nouveaux groupements pour structurer les grandes agglomérations multicommunales et, pour la première fois, les a doter de compétences obligatoires. C’est ainsi que sont institués, par l’ordonnance du 5 janvier 1959, les districts urbains.

L’évolution se poursuit avec la loi du 31 décembre 1966 instituant les communautés urbaines dont celles de Bordeaux Lille, Lyon et Strasbourg.

Enfin, la loi du 10 juillet 1970 favorise la création et la réalisation de villes nouvelles.

À LA RECHERCHE
D’UNE ORGANISATION RATIONNELLE DES TERRITOIRES

L’intercommunalité, conçue initialement pour assurer la gestion intercommunale de services, comme la distribution d’eau ou l’électrification, dans la France rurale du début des années 1900, évolue dès les années 1950 dans la perspective d’une organisation rationnelle des territoires, notamment en milieu urbain.

Deux formes de coopération intercommunales se distinguent à la fois par leur finalité et par leur mode de financement :

  • la forme associative qui permet aux communes de gérer ensemble des activités ou des services publics. Son financement provient des contributions budgétaires ou fiscalisées des communes membres (syndicats intercommunaux à vocation unique ou multiple, syndicats mixtes).
  • la forme fédérative qui tend à regrouper des communes pour faire face aux grands enjeux posés par l’aménagement. Son financement est assuré par la fiscalité directe locale (taxes foncières, d’habitation ou professionnelle) levée par les établissements publics de coopération intercommunale (districts, communautés urbaines, syndicats d’agglomération nouvelle).

1. LOI DE 1992

La loi n°92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République amorce une relance de l’intercommunalité. Afin de développer et renforcer la coopération intercommunale, la loi crée deux nouvelles structures intercommunales complémentaires, destinées à favoriser le développement économique local et l’aménagement de l’espace :

  • les communautés de communes initialement destinées à fédérer des communes en milieu rural,
  • les communautés de villes appelées à fédérer des communes pour former une agglomération de plus de 20.000 habitants.

La coopération intercommunale, conçue par ce texte, est fondée sur la notion de projet de développement organisé au sein d’un espace de solidarité (bassin de vie et d’emploi).

Afin de marquer le caractère intégré de ces structures, la loi leur confère des compétences de nature obligatoire. Ces nouvelles structures tendent aussi à harmoniser les politiques fiscales et notamment le taux de taxe professionnelle.

2. LOI DE 1999

La loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale constitue une deuxième étape au processus de regroupement des communes autour d’un projet commun de développement. Une nouvelle catégorie d’établissement public de coopération intercommunale est créée avec les communautés d’agglomération. Leur vocation est, à l’instar des communautés urbaines, de rationaliser et de structurer les aires urbaines dans une optique d’efficacité renforcée et d’exercice des compétences à une échelle de territoire pertinente.

Cette loi modifie et simplifie ainsi profondément l’architecture de l’intercommunalité à fiscalité propre qui repose désormais sur 3 types d’EPCI, au lieu de 5 auparavant, chacun disposant de compétences élargies suivant son degré d’intégration.

  • la communauté de communes,
  • la communauté d’agglomération (regroupant des communes formant un ensemble de plus de 50.000 habitants d’un seul tenant et sans enclave),
  • la communauté urbaine (regroupant des communes formant un ensemble de plus de 500.000 habitants d’un seul tenant et sans enclave).

Parallèlement, cette loi programme la transformation des districts et des communautés de villes, cette dernière catégorie ayant au demeurant peu séduit (5 communautés de villes existaient au 1er janvier 2002).

La loi institue de nouvelles règles juridiques et fiscales pour rationaliser la coopération intercommunale, faciliter son intégration et renforcer ses moyens d’action en vue de satisfaire à l’objectif de développement économique local affiché dans la loi de 1992.

NOUVELLES RÈGLES JURIDIQUES

  • Une commune ne peut appartenir à plus d’un E.P.C.I. à fiscalité propre.
  • La transformation d’un E.P.C.I. à fiscalité propre en une autre catégorie d’E.P.C.I. à fiscalité propre est possible par une procédure ne nécessitant pas la création d’une nouvelle personne morale.
  • Les compétences transférées aux communautés urbaines ont été renforcées, celles transférées aux communautés d’agglomération sont particulièrement intégrées.

Enfin, cette loi unifie les règles de fonctionnement des EPCI en créant un tronc commun de règles applicable à toutes les catégories d’EPCI qu’il s’agisse de leur création, des conditions de l’évolution de leur périmètre ou de leur fonctionnement.

NOUVELLES RÈGLES FISCALES

  • La taxe professionnelle unique est désormais ouverte aux trois formules de l’intercommunalité à fiscalité propre. Elle est obligatoire pour les communautés d’agglomération et les nouvelles communautés urbaines, optionnelle pour les communautés urbaines existantes et les communautés de communes.
  • La fiscalité mixte permet au groupement, en plus de la taxe professionnelle, de voter des taux additionnels de taxe foncière et de taxe d’habitation.
  • La déliaison partielle des taux : les groupements ne se voient plus contraints de diminuer leur propre taux d’imposition à la suite de choix budgétaires et fiscaux de communes.

3. LOI DE 2004

La loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (publiée le 17 août 2004) consacre son titre IX à l’intercommunalité. Il vise à renforcer la cohérence des périmètres des structures intercommunales, à faciliter leur évolution vers des structures intégrées et à améliorer leur fonctionnement.

RÉFÉRENCES
Loi du 5 avril 1884 sur l’organisation et les attributions des conseils municipaux (dite Loi municipale).
Loi du 22 mars 1890 modifiant les articles 169 à 180 sur les syndicats de communes.
Loi n°92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République.
Loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale.
Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

MORGAND Léon, La loi municipale, commentaire de la loi du 5 avril 1884 sur l’organisation et les attributions des conseils municipaux, 1902, Berger-Levrault, 2 tomes. Voir «Des syndicats de commune», p. 499- 528.

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