Mensonges et politique (Platon)

Les sondages d’opinion rappellent de façon permanente que les Français, dans des proportions importantes, considèrent que les hommes et les femmes politiques, soit ne disent pas toute la vérité, soit mentent, tout simplement. Pour réfléchir sur ce sujet, il est intéressant de relire les auteurs anciens. Ainsi, 400 ans avant Jésus-Christ, PLATON dans son ouvrage La République, fait ce constat : « C’est donc à ceux qui gouvernent la cité – si vraiment on doit l’accorder à certains – que revient la possibilité de mentir ».

LE POUVOIR MENT NÉCESSAIREMENT

Comment accepter que ceux qui gouvernent la cité disent des choses inexactes, des fables, des histoires, des inventions, des tromperies, des boniments, des duperies… ? Nous sommes en présence de la célébration de l’homme politique, cynique, prêt à tous les mensonges pour se maintenir, coûte que coûte, au pouvoir. Pour le philosophe Cédric ENJALBERT, la réflexion sur le mensonge participe chez PLATON à l’établissement de la justice dans la Cité idéale. Il est « utile aux hommes à la manière d’une espèce de drogue », car il en possède les mêmes effets : accoutumance, stimulation et anesthésie, tous propices « à tenir les hommes » à leur place, comme des animaux dominés, dressés.

POUVOIR ET MANIPULATION

« Mensonge par ignorance », qui trompe – le plus souvent du fait de leur inculture – ceux-là même qui le disent. « Mensonge en parole » que le menteur professe consciemment : mensonges adressés à l’ennemi pour le leurrer, pour le manipuler, aux membres de la cité pour leur livrer des récits mythiques, des fables, des fictions, dénoncer des complots imaginaires…
Est-il acceptable que le capitaine d’un bateau – que tout le monde suppose instruit en matière de navigation – lorsqu’il perd le cap et risque le naufrage, mente ? De même, est-il acceptable que les gouvernants, capitaines de la Cité, mentent aux citoyens pour asseoir leur pouvoir en leur imposant une place d’exécutants, muets et dociles ? Telle est la question que nous pose PLATON.

PEUT-ON PENSER AUTREMENT QUE LE POUVOIR ?

Le mensonge démagogique est-il un monopole d’État, les « poètes » étant des concurrents à évincer, car s’opposant aux mythes officiels ? Le mensonge démagogique est aussi un monopole à l’échelle plus modeste d’autres territoires : pensons aux régions, aux départements, aux communes… Ceux qui ne pensent pas comme le détenteur du pouvoir sont des concurrents à évincer, car ils s’opposent aux mythes officiels.
Il ne faut pas être dupe d’un monde qui relève la transparence au rang d’idéal, et dans lequel les fausses vérités deviennent autant de dictatures. Comme le rappelle Cédric ENJALBERT « La politique reste une affaire de langage, de rhétorique, de jeu de mensonge. Prétendre le contraire serait mentir ».
Néanmoins nous croyons dans le progrès et la perfectibilité des hommes, des femmes, des institutions. Nous pensons que la vérité doit triompher du mensonge. Seule la vérité nous rend libre.

La Lettre de Bernard Mérigot, 23 juin 2010

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