Accéder au pouvoir et gouverner sont-elles deux activités différentes ? (Jean-Jacques Rousseau et Cornelius Castoriadis)

LA LETTRE DU LUNDI DE MIEUX ABORDER L’AVENIR, n°86, lundi 7 avril 2014

OBSERVATOIRE DES CONSEILS MUNICIPAUX ET COMMUNAUTAIRES

DÉCODAGE

CONTEXTE. Tous les conseils municipaux de France, durant ces deux semaines des 24 et 31 mars 2014 ont tenu leur première séance à la suite des deux tours des élections municipales des 23 et 30 mars 2014. Elles comprenaient toutes : l’« installation » des conseillers municipaux élus, l’élection du maire, l’élection des adjoints.
ENJEUX. Les réunions de ces assemblées se situent dans la continuité temporelle des élections. Mais doit-on considérer pour autant qu’elles sont deux étapes d’une même pratique de la démocratie ? Est-ce le même acteur qui interprète d’abord le rôle de candidat, puis de celui de maire ? Ou bien s’agit-il de deux acteurs différents ? Et les qualités mobilisées, les discours tenus, les actes attendus, sont-ils de même nature ? Ou bien sont-ils radicalement différents ?

Élection d’Éric MEHLHORN, maire de Savigny-sur-Orge
6 avril 2014

LIBERTÉ INSTANTANÉE ET LIBERTÉ DURABLE

Jean-Jacques ROUSSEAU écrit : « Les Anglais croient qu’ils sont libres parce qu’ils élisent des représentants tous les cinq ans, mais ils ne sont libres qu’un jour pendant cinq ans. » Cornelius CASTORIADIS commente cette phrase par cette réflexion : « Rien ne garantit que quelqu’un qui accède au pouvoir sache gouverner. » Nous la doublerons par sa phrase miroir. « Rien ne garantit que quelqu’un qui sache gouverner accède pour autant au pouvoir. (1)
La démocratie serait-elle alors peuplée, d’une part d’hommes et de femmes qui savent gouverner et qui ne parviennent pas à accéder au pouvoir, et d’autre part d’hommes et de femmes qui accèdent au pouvoir et qui ne savent pas gouverner ? Le destin de la démocratie serait alors tragique.

Pourquoi ? Parce que, comme l’écrit Cornelius CASTORIADIS, « accéder au pouvoir signifie être télégénique, flairer l’opinion publique. » Une mystérieuse alchimie s’opère. Elle fait que, pendant la journée d’un dimanche, le pouvoir « se dissout » et le soir, ou la semaine d’après, « se réincarne ». C’est ce qu’il appelle l’hypostase, c’est-à-dire le principe premier, de la délégation du peuple à l’égard de ses représentants, marqué par deux temps symboliques : celui de la désincarnation, puis celui de la réincarnation.

RÉFÉRENCES
CASTORIADIS Cornelius,
« Contre le conformisme généralisé. Stopper la montée de l’insignifiance, Le monde diplomatique », août 1998, p. 22-23. http://www.monde-diplomatique.fr/1998/08/CASTORIADIS/10826
Texte établi à partir de l’entretien accordé en novembre 1996 par Cornelius Castoriadis à Daniel Mermet pour l’ émission de la radio France-Inter « Là-bas, si j’y suis » à la suite de la publication de La Montée de l’insignifiance (Seuil, Paris, 1996).
CASTORIADIS Cornelius, La Montée de l’insignifiance, Seuil, 1996.
CASTORIADIS Cornelius,
Post-sciptum sur l’insignifiance, Entretiens avec Daniel Mermet, Éditions de l’Aube, La Tour-d’Aigues, 1998.

Article sur le même sujet en ligne sur http://www.savigny-avenir.fr.

http://www.savigny-avenir.fr/2011/07/14/la-critique-politique-de-la-«-democratie-»-representative-cornelius-castoriadis/

La Lettre du lundi de Mieux Aborder l’Avenir
n°86, lundi 7 avril 2014

Mention du présent article http ://www.savigny-avenir.info
ISSN 2261-1819
BNF. Dépôt légal du numérique, 2014

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