L’Open data et la modernisation de l’action publique des territoires : la « feedback loop » est indispensable (Simon Chignard)

LA LETTRE DU LUNDI DE MIEUX ABORDER L’AVENIR, n°56, lundi 9 septembre 2013

DÉCODAGE

CONTEXTE. Le gouvernement français a donné à ÉTALAB la mission de « moderniser l’action publique par l’open data » (1).
ENJEUX.
Un projet de mise à disposition de données publiques permet-il d’améliorer les services publics au niveau territorial local ? Non, répond Simon CHIGNARD, pas tant que n’est pas mise en œuvre une « boucle de rétroaction » (feedback loop) (2).

 ON OUBLIE LA RÉTROACTION

On sait que pour un territoire, toute réalisation d’open data doit obéir à un préalable : que toutes les données publiques concernant la gouvernance de la collectivité publique soient accessibles en ligne. Pour une commune, une communauté, un syndicat intercommunal, un département, un service public…, il s’agit de tous les actes administratifs (délibérations, pièces visées, conventions, notes de synthèses, rapports, budgets, arrêtés, règlements publications…)

Ensuite, lorsqu’un open data s’ouvre, qu’est-ce qui fait défaut ? Le modèle actuel est le suivant : un acteur public (ou privé) met à la disposition de réutilisateurs des données ouvertes. Ceux-ci développent des services, des applications, souvent utiles, mais bien souvent ces utilisations ne produisent aucun effet sur les pratiques de l’organisation, de la collectivité, du service public. Disposer de tous les horaires des transports en commun (train, bus…) et de leur fréquentation est une première étape. Mais proposer aux gestionnaires des réseaux de transport des améliorations destinées aux usagers constitue la seconde étape.

  • 1. Open data 1 : une organisation publique ouvre des données,
  • 2. Open data 2 : les données servent à des tiers pour améliorer les actions de l’organisation.

Si on s’arrête à la première étape, on s’arrête à mi-course. Nous ne bouclons pas la boucle !

OPEN DATA 1, OPEN DATA 2…

Ce qui manque le plus souvent à l’open data, c’est l’application d’une boucle de rétroaction (feedback loop), principe fondateur de la cybernétique. Comment « boucler la boucle » de l’open data ? En révisant la façon de procéder. Il ne faut pas partir des données disponibles, mais plutôt des questions et des problèmes concrets. Ceux-ci ne peuvent pas être définis par la seule puissance publique. Nous sommes dans une pratique de démocratie participative : il appartient à la société civile d’exprimer ses besoins, et la puissance publique doit les prendre en compte, proposer des scénarios, et les soumettre au débat citoyen.

UN PLAN DE ROUTE POUR L’OPEN DATA 2

Quel peut-être le plan de route à suivre ?

  • Définir les questions, les problèmes… des politiques publiques.
  • Documenter la problématique et ses principaux enjeux.
  • Recenser, lister et ouvrir les « jeux de données » pertinents.
  • S’appuyer sur des médiateurs tiers.
  • Proposer des challenges, des concours.
  • Faciliter la réintégration des résultats au sein des services et des administrations.
  • Partager les questions qui se posent quotidiennement dans l’action publique.
  • Faire le lien entre l’ouverture des données publiques et la cohérence des politiques publiques.

L’OPEN DATA ET LA VILLE INTELLIGENTE

La donnée est le premier élément constitutif de la ville intelligente. Une ville intelligente ne peut se limiter à être seulement « une ville numérique ». Dans une ville intelligente, les nouvelles technologies n’ont de sens qu’à partir du moment où un usage collectif, citoyen, est en capacité de capter, d’interpréter, de transformer, et de restituer des données créatrices de valeur.

PAS D’OPEN DATA SANS BESOIN

Mais cette valeur ne se crée que si elle rencontre un usage ou un besoin. « C’est à celui qui saura capter et interpréter de la meilleure manière les données disponibles et la restituer sous forme innovante, enrichie par d’autres. » (3) 

Dans la ville intelligente, il y a certes, de nouvelles technologies, mais aussi un fonctionnement en réseau de la ville. Chacun est à la fois générateur et consommateur de données.

L’open data s’inscrit dans une logique contributive. Ne l’oublions pas.

RÉFÉRENCES
1. ÉTALAB (Service du Premier ministre chargé de l’ouverture des données publiques et du développement de la plateforme française Opendata), « Open data. Le gouvernement confirme la poursuite des demandes d’ouverture des données publiques. Communiqué de presse, 31 octobre 2012 », www.etalab.fr
2. CHIGNARD Simon, « Moderniser l’action publique par l’Open data ? », www.donneesouvertes.info, 3 janvier 2013.
CHIGNARD Simon, L’Open data, comprendre l’ouverture des données publiques, Fyp Éditions.
3. DAVID Thimothée, « La donnée : carburant de la ville intelligente », Direction de la prospective et du dialogue public, Grand Lyon Communauté urbaine, 18 décembre 2012.

La Lettre du lundi de Mieux Aborder l’Avenir
n°56, lundi 9 septembre 2013

Mention du présent article http ://www.savigny-avenir.info/ISSN 2261-1819
BNF. Dépôt légal du numérique, 2013

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